Des nouvelles recommandations ont été émises en 2021 pour la prise en charge non pharmacologique des malades atteint de gonarthrose par les membres de la Société Française de rhumatologie et la Société Française de médecine physique et de réadaptation (1).
Même si l’arthrose est considérée comme une maladie bénigne, elle impacte de manière importante la vie des patients. Une enquête menée à Liège montre qu’avoir une arthrose à 60 ans impacte tous les éléments de la vie quotidienne comme l’image de soi, le moral, les loisirs et le sport, la vie de famille, la vie sexuelle, les activités sociale et qu’elle entraîne des troubles du sommeil non négligeables. Par ailleurs, au cours de son évolution avec la destruction cartilagineuse, la perte d’autonomie et la fonte musculaire, une chute peut arriver qui va aggraver la pathologie arthrosique du genou mais également l’autonomie du sujet.
Une étude coordonnée par les CHU de Nancy et de Caen dirigée par le Professeur Anne-Christine RAT (1) a suivi 600 patients, pendant plus de 5 ans, afin d’identifier le facteur de chute. Si une arthrose des membres inférieurs facilite la chute, du fait des douleurs et de la faiblesse musculaire, il est important de souligner que les traitements médicaux ont une part non négligeable. En effet la morphine mais aussi les antalgiques de pallier II peuvent, par des effets de somnolence, être responsable de chute.
Aujourd’hui il est clairement démontré que le risque de chute est augmenté de près de 40 % sous opioïde faible. Par ailleurs, d’autre traitement comme des anti-cholinergiques, utilisés notamment en ophtalmologie et en urologie, peuvent être des facteurs de risque. Il est important d’informer les patients sur les risques de chute avec cette prise médicamenteuse.
D’où l’intérêt de traitement infiltratif de façon à éviter tous les effets secondaires des traitements pharmacologiques, comme les anti-inflammatoires et les antalgiques de pallier II.
Une nouvelle étude réalisée par le Docteur Florent EYMARD (1) a consisté à pratiquer une injection unique de PRP sur plus de 250 patients ayant une gonarthrose avancée symptomatique. Les résultats montrent que la douleur a été réduite de façon substantielle après une injection, et la douleur a été d’autant plus diminuée que les patients étaient douloureux.
Ils ont constaté également que la réduction de poids, lorsqu’elle est conseillée, rendait l’injection plus efficace. Par ailleurs, pour l’atteinte fémoro-patellaire, sans signe de destruction radiographique, ils ont démontré que l’injection de PRP entraînait une bonne réponse sur la douleur.
En 2012 l’American College of rhumatology (2) avait établi des recommandations qui reprenaient le triptyque, exercice, éducation et réduction pondérale.
Il faudra toujours proposer l’activité physique adaptée de façon à pouvoir permettre aux patients d’avoir une autonomie. L’activité physique peut se déroulée à sec ou en milieu aquatique, ciblant bien sûr les membres inférieurs, elle doit être proposée et adaptée à chaque patient (3). Cette activité physique peut être encadrée dans un premier temps par un kinésithérapeute, dans la mesure où la dernière étude faite par le Professeur Christian ROUX sur la rééducation du genou, ne montre pas de différence entre les différentes modalités de rééducation, aussi bien en concentrique qu’en excentrique. Ils ont démontré un résultat favorable de ce type de rééducation.
Le kinésithérapeute est à même de proposer des auto-exercices que le patient peut effectuer régulièrement chez lui. Par ailleurs, il peut travailler en collaboration avec des coachs sportifs, diplômés APA (Activité Physique Adapté), pour permettre aux patients une meilleure reprise de l’activité physique.
Pour un meilleur résultat, l’injection de PRP sera couplée à une prise en charge holistique (4). Il convient d’évaluer l’inégalité des membres inférieurs et d’envisager la prescription de semelles orthopédiques, lorsqu’il existe des troubles de la statique qui sont associés.
L’ensemble peut être couplé a de la physiothérapie antalgique et notamment à de l’électrothérapie. Une étude réalisée par le Docteur Emmanuel MAHEU (1) à l’hôpital Saint-Antoine, a montré l’intérêt de mettre en place un dispositif de neurostimulation électrique transcutanée (TENS) qui pourrait être connecté à un Smartphone, avec application d’électrode de façon standardisée, qui permettrait une amélioration sur les douleurs, avec une bonne tolérance et une diminution de la consommation des opioïdes.
La perte de poids doit être encouragée, lorsqu’elle est conseillée. En effet, en cas de surpoids ou d’obésité, une perte de poids corporelle de 5 % du poids initial peut être proposée, chaque pour cent perdu permettant d’améliorer de 2 % le score WOMAC. Cette perte de poids ne doit pas être trop rapide pour éviter une fonte musculaire et peut être encadrée le cas échéant par un professionnel de santé, associé bien sûr à un professionnel de l’activité physique. Des recommandations de l’EULAR (Europeen League Against Rheumatism) avaient été publiées sur les stratégies de réduction pondérale en 2013 (cf. encadré).
Encadré : Recommandations de l’EULAR sur les stratégies de réduction pondérale.
L’éducation concernant la réduction pondérale doit s’appuyer sur des stratégies individualisées dont l’efficacité est reconnue pour perdre du poids sans en reprendre :
- Pesée régulière chez le sujet en notant son poids une fois par mois. - Réunion régulière de groupe de soutien pour évaluer et discuter des progrès. - Augmentation du niveau d’activité physique. - Suivi d’un plan de menu structuré dès le petit-déjeuner. - Réduction des apports en graisse (en particulier saturée, en sucre et en sel, augmentation de la prise de fruits et légumes au minimum 5 fois par jour). - Limitation de la taille des portions. - Abord des comportements alimentaires et des facteurs déclenchant de la prise (le stress par exemple). - Réalisation d’une éducation nutritionnelle. Apprentissage de l’appréhension des rechutes (recours aux stratégies de coping par exemple). |
Ainsi le patient peut passer d’un cercle vicieux à un cercle vertueux et devenir acteur de sa propre prise en charge. En effet, lorsque les douleurs sont trop importantes, que la douleur ne permet pas de faire de l’activité physique, le patient se trouve confronter à une perte musculaire ainsi qu’une prise de poids qui aggrave l’ensemble de sa symptomatologie.
La prise en charge globale avec des traitements pharmacologiques et non pharmacologiques, notamment avec l’injection de PRP associée à une rééducation ciblée, une reprogrammation musculaire d’exercice physique adaptée, associée à une perte pondérale, qui sera encadrée par des professionnels de la santé, va remettre le patient dans un cercle vertueux où plus il va faire d’activité physique plus il va se muscler, plus il va perdre du poids et mieux sera nourri son cartilage.
Cette prise en charge doit être effectuée tout au long de la vie du patient. La consultation annuelle, éventuellement associée à une injection de rappel de PRP, permet de réactualiser les connaissances du patient, de l’encourager et éventuellement de discuter sur d’autres renforcements musculaires et d’autres activités physiques qu’il pourrait effectuer du fait de l’amélioration de son arthrose.
L’arthrose n’est pas une fatalité et le patient peut devenir acteur de sa prise en charge, encadré par des professionnels de santé.
Bibliographie :
1 - Dossier rhumatologie, Egora, Le Panorama du Médecin N° 316, Janvier 2022
34ème congrès français de rhumatologie 12-14 décembre 2021
2 - Hochberg M.C., Altman R.D., April K.T. et al.
American college of rheumatology 2012.
Recommendations for the use of non-pharmacologic and pharmacologic therapies in osteoarthritis of the hand hip and knee. Arthritis Care Res (HOBKEN) 2012 ; 64 (4) : 465-74
3 - Coudeyre E.
Recommandation pour la gonarthrose : Toujours plus d’éducation et d’exercice.
La Lettre du Rhumatologue n°409 février 2015
4 - Chaduteau P.
Utilisation du plasma riche en plaquette en traumatologie du sport.
Sport santé news 2018, 16-20.